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Depuis la suppression de la taxe d’habitation, et avec le renforcement des contraintes financières qui pèsent sur les collectivités, l’optimisation du calcul de la TEOM est devenue ces dernières années un levier financier que les intercommunalités suivent de près.   Les récentes décisions du Conseil d’État et des juridictions administratives viennent année après année affiner les conditions de calcul du taux de TEOM. Pour y voir clair, nous revenons sur les points saillants des évolutions jurisprudentielles 2024-2025 : nouvelles règles d’appréciation de la proportionnalité du taux, impacts spécifiques pour les EPCI adhérant à des syndicats mixtes, clarification des postes de dépenses éligibles.

Une assiette du calcul du taux de TEOM plus clairement définie

Sur sa présentation et sa base légale

La jurisprudence récente souligne l'obligation pour les collectivités de respecter scrupuleusement les procédures de communication des documents budgétaires, condition sine qua non de la légalité de leurs délibérations en matière de TEOM.

En novembre dernier1, le Conseil d’État a rappelé que la validité d'une délibération est conditionnée par la communication en temps utile de l'ensemble des pièces budgétaires pertinentes, incluant toutes les annexes requises par le Code général des collectivités2. Les élus doivent disposer de tous les éléments nécessaires, afin de délibérer en toute connaissance de cause.

Par trois autres décisions du même mois, une clarification importante a été opérée par la haute juridique administrative en matière du calcul du taux de TEOM par les EPCI3.  

Après avoir rappelé qu’une délibération doit être prise avant le 15 octobre de l’année pour être applicable à compter de l'année suivante, le Conseil d’État considère :

D’une part, qu’après une fusion d’intercommunalités, le maintien des régimes de TEOM hérités des anciens EPCI ne peut excéder cinq ans4. Passé ce délai et à défaut de nouvelle délibération régulière, la taxe est dépourvue de base légale, ce qui entraîne l’illégalité de l’imposition.

D’autre part, lorsque la compétence déchets est exercée via un syndicat mixte, le caractère manifestement disproportionné du taux doit être apprécié au regard des dépenses réelles engagées par le syndicat pour le territoire de l’intercommunalité, et non du seul montant de la contribution intercommunale à ce dernier.

Sur les composantes à prendre en compte

Le Conseil d’État n’a de cesse de rappeler que le calcul du produit attendu de la TEOM et, partant, du taux, doit strictement respecter les dispositions du CGI5 et ne couvrir que les dépenses réelles exposées pour le service de collecte et de traitement des déchets ménagers par le syndicat mixte ou l’EPCI compétent.

Les dépenses éligibles sont principalement :

  • les coûts de directions ou services transversaux de la collectivité directement exposés pour le service public6 ou les charges exceptionnelles de fonctionnement lorsqu’elles n’ont pas le caractère de dépenses d’ordre7 ;  
  • les dépenses non couvertes par la redevance spéciale ou les autres recettes non fiscales spécifiques au territoire considéré8 ;
  • Les dépenses de fonctionnement réellesstrictement attribuées à la collecte et au traitement des déchets ménagers et assimilés, les dotations aux amortissements des immobilisations affectées au service, ainsi qu’une quote-part des coûts des services transversaux9.

A contrario, ne sont pas éligibles10 :

  • l’inclusion de dépenses périphériques (sensibilisation, prévention, actions contre le gaspillage alimentaire, augmentation de la durée de vie des produits) ;
  • Les dépenses relatives au traitement des déchets non ménagers explicitement exclus du périmètre financé par la TEOM, dont les charges de personnel n’exerçant pas des missions en lien direct avec le service.

La TEOM, toujours une stratégie pour développer des marges de manœuvre fiscales ?

Un contrôle de proportionnalité du taux de TEOM stabilisé à moins de 15%

L’ouverture orchestrée par une jurisprudence du Conseil d’État de 202111 admettant qu’un taux de TEOM excédentaire, en l’occurrence de moins de 15 %, est proportionné, semble dorénavant bien établie. 

La jurisprudence récente affine le contrôle de proportionnalité, les seuils d’excédent admis et illustre la rigueur du contrôle exercé par les juges administratifs. Il apparait ainsi une invalidation systématique de tout excédent de produit supérieur à 15 %12 voire, désormais, à 12-14 %13 selon les années et les territoires. À l’inverse, des taux entraînant des excédents de 47 % ou 52,9 % demeurent jugés manifestement disproportionnés14.

Par ailleurs, aucune nouvelle instruction de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) à destination des préfets ou des directeurs départementaux des finances publiques n’est venue modifier la dernière note publiée en 2022 relative au contrôle de légalité en matière de taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM).

Cette instruction de référence maintient un seuil maximal d’écart raisonnable fixé à 15 % entre le produit de la TEOM et le coût du service.

Conformément à cette absence d’évolution normative, la doctrine fiscale demeure également inchangée15.

Mesures opérationnelles pour le calcul du taux : contrôle ex ante et justification analytique

Au vu de ces évolutions jurisprudentielles, les collectivités et syndicats mixtes sont invités à :

  • Instituer une comptabilité analytique territorialisée et régulièrement actualisée ;
  • Publier des annexes budgétaires explicites et accessibles, permettant d’assurer la traçabilité et la transparence du calcul du taux pour chaque secteur de prélèvement ;
  • Démontrer l’exclusion systématique des coûts ne relevant pas du service déchets ménagers et la déduction des recettes non fiscales réellement perçues ;
  • Mettre en place un contrôle interne formalisé du calcul du taux, en intégrant une veille réglementaire et jurisprudentielle constante ;
  • Veiller à la coordination entre tous les acteurs du territoire pour harmoniser les pratiques justificatives, réduire les disparités et prévenir le risque d’annulation contentieuse.

Par cette approche rénovée, le taux de TEOM devient un instrument fiscal dont la légalité dépend désormais d’une justification budgétaire ultra-fine et d’une traçabilité totale des coûts, chaque étape du calcul devant pouvoir être opposée au juge comme au contribuable.

Quelques précisions

  1. Conseil d’État, 19 novembre 2025, n°487829
  2. Articles L. 2121-12, L 2121-13, L. 2312-1 et L. 2313-1 du code général des collectivités territoriales
  3. Conseil d’État, 12 novembre 2025, n°501632, n°501633, n°501640    - Mentionnés aux tables du recueil Lebon
  4. Article 1639 A bis, III du code général des impôts
  5. Article 1520 du code général des impôts
  6. Conseil d'État, 14 avril 2023, n° 465403 - Société OPPCI Sogecapimmo - Mentionné aux tables du recueil Lebon
  7. Conseil d'État, 22 octobre 2021, Métropole de Lyon, n° 434900 – Publié au recueil Lebon
  8. Conseil d’État, 8 novembre 2024, n° 490556 – Inédit au recueil Lebon
  9. Conseil d'État, 29 novembre 2021, Métropole de Lyon, n° 454684
  10. Conseil d’État, 19 novembre 2025, n°487829
  11. Conseil d'État, 8ème Ch., 5 mai 2021, n° 438897
  12. Tribunal Administratif de Nantes, 5 décembre 2024, n° 2103895, n° 2103897 et n° 2103538 - un excédent de 15,15 % caractérise une disproportion manifeste
  13. Tribunal Administratif de Nantes, 19 décembre 2024, n° 2111956 – pour un taux de TEOM de 12,81%
  14. Tribunal Administratif de Paris, 4 juin 2025, n°2405738 15 : BOFIP n° BOI-IF-AUT-90-30-10

Abréviations

  • TEOM : taxe d’enlèvement des ordures Ménagères
  • CGI : Code général des impôts
  • CGCT : Code général des collectivités Territoriales
  • DGFiP : Direction Générale des Finances Publiques

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